Emmanuel ou le bronze sacré de Notre-Dame
Le bourdon Emmanuel est la seconde plus grosse cloche de France avec ses 13 tonnes, tandis que celle du Sacré-Cœur de Paris pèse près de 19 tonnes. Mais elle est la plus ancienne puisqu’elle a plus de 330 ans, sans compter l’âge de Jacqueline, l’ancienne cloche qu’entendait Villon au XVe siècle et qui fut refondue sous Louis XIV en 1686 ; on doubla alors son poids.
Le bourdon porte le nom du Christ, Emmanuel, suivi des noms de ses parrain et marraine : Louis-Thérèse, soit le roi Louis XIV et la reine Marie-Thérèse d’Autriche.
Elle n’a pas un son très grave car elle sonne en fa dièse, mais avec une pureté et une musicalité dont la réputation est mondiale.
Son installation a été d’une extrême difficulté : il a fallu au XVIIe siècle installer un plan incliné de milliers de troncs d’arbres pour hisser le bourdon d’abord en haut de la tour sud, puis il fallut la redescendre à l’intérieur. L’exercice nécessita une semaine et demie pour être mené à bien.
A ses côtés dans la même tour sud, a été installé pour ménager Emmanuel un bourdon plus petit baptisé Marie en l’honneur de la Vierge ; le gros bourdon n’est sonné que pour des événements exceptionnels : ainsi a-t-il sonné le glas des obsèques de Arnaud Beltrame en 2018, honorant son dévouement héroïque, passé au rang d’exemple national.
Puisque la cloche a vocation religieuse, elle est considérée comme une personne et ne peut entrer dans le clocher sans avoir été bénite ; elle reçoit alors un nom de ses parrain-marraine dont les noms sont inscrits sur sa « robe ».
La tour sud de Notre-Dame où sont les deux bourdons.
Les poètes ont été inspirés par cette puissance sonore qui va bien au-delà d’un simple rappel de l’heure ou d’un appel à la prière.
« La cloche, écho du ciel placé près de la terre !
Voix grondante qui parle à côté du tonnerre,
Faite pour la cité comme lui pour la mer !
Vase plein de rumeurs qui se vide dans l’air »
Victor Hugo
« Les clochers s’ébranlent aux vieilles tours gothiques
Et revenant des siècles catholiques
Font tressaillir quand même aux frissons anciens
Ce qui reste de foi dans nos vieux os chrétiens »
Albert Samain
Les Sonneurs (1841) peinture de Gabriel Descamps (Louvre)
On a dit qu’il fallait 8 hommes pour ébranler le battant du bourdon qui pèse 500 kg. Il en faut certes au moins deux qui successivement tirent le lourd battant à l’aide de cordes attachées à son extrémité - du moins avant l’électrification ou... quand, après l’incendie, l’installation électrique est hors d’usage.
La Rigaude de Rouen est restée célèbre dans une expression populaire puisque les sonneurs buvaient le cidre qui donne assez de forces pour l’ébranler... à tire larigot !!
Carte postale (1916) brodée à la mode d’une époque où les petites mains faisaient merveille - même pendant la Grande guerre.
Carillons de plein-vent et Anne-Geneviève, cloche de la tour nord dirée à l’or fin, baptisée Anne du nom de la mère de la Vierge et Geneviève patronne de Paris ( et des gendarmes !) illustrations de mon précédent blog non enregistré...
Il semble qu’Overblog soit revenu à de meilleurs sentiments puisqu’il accepte à nouveau mon article. Entre-temps j’ai publié à grand misère un hommage aux carillons (quadrillons à 4 cloches !) à partir de ma boîte-mail !
Le beau ciel du Morvan qui se rit de tout confinement !